Jean-Claude
Vian
sculpture

Sculpture
sur bois

Jean-Claude Vian

Avant de sculpter le bois, il y a déjà la sculpture du regard, la découverte d’un éclairage possible sur un objet qui pourrait devenir sujet, l’intuition d’une aventure à tenter à travers cette branche, cette souche, cette écorce. C’est l’histoire d’une rencontre.
Mais bien avant le geste de sculpter, il y a la nature, englobante et définitive. Pas de sculpture sans elle. Sans elle dans notre corps, dans nos pas, dans notre marche. Elle est notre façon de respirer et d’être au monde.

Ma sculpture découle de mes nombreuses marches à travers les arbres, les troncs et les feuillages. Elle est une manière de continuer le voyage, non plus à la surface, sur les sentiers balisés, mais en basculant dans la profondeur d’une écorce ou d’une souche, dans les veines insolites d’une branche. C’est chercher l’intimité du bois, le dedans, le caché, le domaine des vies larvaires, les marques du temps et des accidents de croissance. Sculpter, c’est dénouer un à un les nœuds du bois, sans desserrer entièrement l’étreinte de la matière. Toute sculpture est une étreinte.

Sans cette connivence avec le bois, avec la terre, rien ne se passe.

Dans mon dernier roman, LE RUISSELLEMENT DU MONDE (Les Impliqués éditeur), mon personnage, Hugo Faye, se met à la sculpture lorsqu’il se retrouve dans la déprime du chômage. Celle-ci va lui permettre de se réinventer, mieux, de trouver un sens possible à sa vie qui n’en avait guère. Je cite quelques lignes de son portrait, qui peuvent donner une certaine idée de ma propre manière de travailler :

« Pendant des heures, il explore les veinures et les cicatrices de ce qui fut un morceau d’arbre, il met à jour les galeries ou les draperies creusées par les insectes. Quand une sculpture jaillit d’entre ses mains, après des heures de travail, il lui semble que c’est le bois qui a parlé.

Il travaille en musique avec la radio. Le plus souvent du jazz ou du classique. Parfois il chantonne, mais c’est rare. La porte métallique de l’appentis reste ouverte pour laisser rentrer le soleil jusqu’à l’établi. Jeanne le surprend là quand elle arrive du travail. Elle n’en revient pas comme il a changé. Il sent le bois, il respire le bois, il creuse à l’intérieur comme un insecte xylophage. Parfois disparaît dans les copeaux qui volent, avec un visage poussiéreux d’enterré vivant. Des quintes de toux sèche le secouent. Il se tape avec le poing le haut de la poitrine. Mais ses réalisations sont belles et surprenantes. C’est tellement nouveau tout ça, après les mois de déprime. » [Les dernières phrases reflètent le point de vue de Jeanne, la femme de Hugo].

J’ai plaisir pour finir, à remercier Alain Duval qui a réalisé ce site.

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